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Déficits de perception et de motricité dans l'espace (PMDIS)

Il ressort d'une étude parrainée par l'Agence spatiale canadienne (ASC) que les stress liés à la vie dans l'espace, comme le mal de l'espace, le manque de sommeil et les charges de travail exigeantes, sont les principales causes des difficultés que rencontrent les astronautes appelés à effectuer des tâches de coordination oculo manuelle de précision.

L'étude, intitulée Déficits de perception et de motricité dans l'espace (PMDIS), a également permis d'établir que le corps des astronautes doit être immobilisé quand ils effectuent des mouvements requérant une motricité fine, mais qu'il n'est pas nécessaire d'immobiliser leurs bras.

Photo de l'astronaute Suni Williams travaillant avec PMDIS

L'astronaut de la NASA Suni Williams a fait l'expérience PMDIS à bord de la Station spatiale internationale en décembre 2006. (Source : NASA.)

Selon le chercheur principal, le neuroscientifique Barry Fowler de l'Université York, l'expérience ne corrobore pas la théorie scientifique prédominante voulant que les déficits de motricité fine soient causés par les effets de la microgravité sur le système vestibulaire du cerveau. Il croit que ses résultats sont « plutôt probants et qu'il n'y a aucune indication confirmant l'influence de la microgravité ».

Il soutient que pour réduire ces problèmes dans l'espace, une formation avant le vol et des « horaires raisonnables » durant les missions sont essentiels. « La Station spatiale internationale est un environnement stressant et confiné où toute sorte de choses peuvent se produire en même temps. Vous devez enseigner au personnel à rester calme et à se concentrer sur une tâche à la fois. Plus la formation sera poussée, moins les effets des stress extérieurs se feront sentir. »

L'expérience a été menée par des astronautes de la navette spatiale travaillant à bord de la station spatiale. On a demandé aux sujets de pointer des cibles sur un écran d'ordinateur au moyen d'un stylet et de déplacer un curseur entre les cibles à l'aide d'une manette. Ils ont également été soumis à un test multitâche (consistant à effectuer les deux tâches précédentes tout en réagissant à des tonalités en appuyant sur un bouton).

Des études précédentes ont indiqué que les capacités des astronautes étaient altérées quand ceux-ci effectuaient des tâches de pointage et de suivi dans l'espace, mais les scientifiques n'ont pu établir les causes de cette altération. Selon la théorie qui était alors largement acceptée, le système vestibulaire, perturbé par la microgravité, envoie des signaux à d'autres parties du cerveau qui contrôlent la motricité fine et causent des déficits de performance pendant environ une semaine, le temps nécessaire au cerveau pour s'adapter à la microgravité.

M. Fowler déclare cependant que, d'après les résultats de son étude, « ces signaux ne sont pas transmis ou n'ont aucun effet sur le système moteur ».

Si l'hypothèse de l'effet de la microgravité avait été exacte, ses tests auraient révélé une réduction de la performance dans l'exécution des tâches faisant appel au stylet et à la manette. Il n'a constaté aucun effet dans le test avec le stylet, et un faible effet seulement dans le test avec la manette. D'après M. Fowler, les tests multitâches consistant à réagir à des tonalités ont également étayé la théorie des agents stressants. Ces doubles tâches (semblables à l'utilisation d'un téléphone cellulaire pendant la conduite d'un véhicule) permettent de comprendre comment le stress réduit l'attention.

En fait, des stress liés à une situation concrète ont fait perdre des données à Barry Fowler quand un sujet s'est laissé distraire par une tâche prioritaire qu'il devait exécuter plus tard : aider un coéquipier à se préparer à une sortie dans l'espace.

« Vous pouvez imaginer la pression. C'était un exemple parfait de la difficulté qu'on peut avoir à ne penser qu'à la tâche en cours et non à la prochaine tâche. »

Photo de la navette spatiale Discovery

Photo de la navette spatiale Discovery prise de la Station spatiale internationale au moment de son arrimage, une manœuvre extrêmement complexe. (Source : NASA.)

Photo d'une astronaute manipulant le Canadarm

Une parfaite coordination est nécessaire aux astronautes pour la réalisation de leurs tâches, comme la manipulation du Canadarm. (Source : NASA.)

M. Fowler croit que les principaux effets sur la motricité notés lors d'expériences antérieures comme celle ci étaient surtout attribuables au flottement des sujets en microgravité. Tous ses sujets étaient retenus à la taille par des sangles de fixation. Certains avaient aussi les bras immobilisés, mais il a été étonné de trouver que cela améliorait peu leur performance.

Il a conclu que « le fait de retenir le sujet par la taille suffisait à régler la question de l'instabilité du corps ».

Les travaux de Barry Fowler ont été appuyés par le Programme des sciences de la vie de l'ASC, dont le mandat consiste notamment à améliorer la compréhension des effets de la microgravité sur la physiologie humaine. Louise Beauchamp, gestionnaire de missions à l'ASC et responsable de l'étude PMDIS, ajoute que ces travaux de recherche pourraient également avoir des incidences opérationnelles, notamment sur la conception des postes de travail des futurs vaisseaux spatiaux.

Photo d'une photo de tests de coordination oeil-main

Dans le cadre de l'étude de la coordination oeil-main dans l'espace, les astronautes devront notamment cliquer sur des cibles avec une manette, tel que démontré par Derrick Piontek de Bristol Aerospace (en anglais seulement). (Source : Université York.)

M. Fowler mentionne également que ses conclusions ont d'autres répercussions sur les missions de longue durée. Par exemple, on a examiné la possibilité de faire tourner les astronautes dans une centrifugeuse afin de créer une gravité artificielle pour contrer les effets physiologiques de la microgravité. Cela pourrait avoir un effet négatif si la microgravité influait de façon importante le contrôle par le cerveau de la motricité fine. Mais l'étude de M. Fowler porte à croire que cela n'est pas un problème.

« Vous pouvez les faire tourner sans vous préoccuper des effets d'adaptation sur les mouvements nécessitant une motricité fine. »

Toutefois, il signale que les vols de longue durée vers la Lune ou Mars créeront plusieurs nouveaux facteurs de stress environnemental. Les équipages seront isolés durant de longues périodes dans un milieu clos et dangereux, et n'auront qu'un contact limité avec la Terre.

« La situation est totalement différente » a-t-il déclaré.

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